Huit février deux
mil quinze. Six heures dix.
Reprise.
AnneAnne,
Malgré ma promesse,
je n'ai pas écrit…
Est-ce que tu vas
mieux ? Je l'espère toujours !
Aujourd'hui, je
dois parler de mon parcours. J'y pense. J’ai écrit quelques notes. Je compte
improviser. J'ai peur de mon bégaiement et de mon mauvais hébreu.
Le temps a changé,
le froid est revenu et la neige est attendue.
Installer un
climatiseur était une mauvaise idée, du bruit, un souffle qui assèche, une
chaleur mal distribuée. Je n’arrive pas à apprendre à me servir de la manette
de commande…
Ce ne sont pas des
plaintes. Peut-être un peu.
Des effets
secondaires avec le trazodil que je ne veux pas décrire…
Est-ce mon
actualité ?
Le studio
« Haoman dix huit » a hébergé des activités variées.
Une femme qui
enseigne le yoga du rire, une nouvelle méthode de yoga promettant que le rire
sauve.
Un groupe de jeunes
qui ont installé une énorme sono entre autres choses. Ces jeunes adolescents
avaient de gros moyens et arrivaient en brandissant des liasses de billet.
Leurs
manifestations étaient très bruyantes, malgré cela, j'arrivais à dormir dans
mon studio.
J’étais déjà
habitué à ces bruits de musique à plein volume. Dans les premières années de
mon séjour dans le studio, se trouvait en face, une boîte de nuit dont la
sonorisation faisait retentir dans mon oreille, de gros « boum boum ».
Un autre désagrément de cette cohabitation était le va et vient incessant de
personnes criant dans la rue, certaines se réfugiant dans les escaliers pour
pratiquer toutes sortes d'actions interdites par la loi.
La porte de
l'immeuble ne se fermant pas, le propriétaire avait abandonné l'idée de
remplacer la serrure trois fois par semaine.
Cette boîte de nuit
a été fermée deux ans après mon arrivée dans le studio. Le propriétaire de ce
club, après un jugement en justice pour non payement de ces impôts a du
s’exiler en prison.
Après une période
de calme, une autre boîte de nuit faisant moins de bruit a pris la place de ce
lieu s'appelant « Haoman dix sept ».
La spécialité de cette
nouvelle énorme boîte, étendue sur trois niveaux, chaque niveau ayant une
couleur, bleu, rose et noire, était de servir des cocktails de la couleur de
l'étage. Les lumières étaient aussi tamisées à la même couleur de l'étage.
J'ai pu visiter cet
endroit en pleine effervescence, grâce à la complicité d'une connaissance qui
avait fonction de gorille.
Des concerts, de
toutes sortes de musique que j'ai découvertes, des expositions, une très belle
soirée de danse Buto, nouvelle danse, venant du japon, extrêmement lente,
devant ma grande fresque « A Deux Mains, A Demain », que nous avions
monté avec un angle, le plafond n’atteignant pas les quatre mètres de hauteur
qu'il faut pour ce tableau.
Après toutes ces
années, le studio a terminé l'hébergement de toutes les pratiques. Je suis resté
seul. Je ne pouvais plus payer le loyer. Un agent immobilier a fait visiter la
place à la directrice de cette école de danse, « Orpheus ». Danse
eurythmique.
Cette branche,
appartenant à l’enseignement anthroposophique fondé par Rudolf Steiner à la fin
du dix neuvième siècle. Talia F., louant la moitié de la place, moi-même
prenant un tout petit studio, le salon étant commun, deux autres studios ont
aussi été occupés par des peintres de ma connaissance. Le prix de la location
était calculé selon le métrage au sol. Pendant la première visite de Talia F.,
devant son hésitation, le métrage de la partie qu’elle désirait ne lui
convenant pas, j'ai joué le rôle d'architecte intérieur, en lui conseillant
d'abattre des cloisons et d'en construire d'autres selon ses besoins. Ce
qu'elle fît en me remerciant. Elle raconte cet épisode jusqu'à présent aux
nouveaux élèves.
J'ai quitté l'endroit
de mes appartements privés pour lui laisser la place et, en attendant, je me
suis installé dans un endroit sans fenêtre, ni lumière.
J'ai pu, après
quelques mois, mon cousin Claude B. ayant trouvé un petit appartement boulevard
Hébron, déménager dans ce lieu, tout en gardant le studio pour peindre.
AnneAnne,
Même si je ne le
fais pas, je pense le faire, c'est à dire écrire la suite dans l'ordre.
Ce qui est certain,
c'est mon attention, constante et constamment renouvelée pour toi, mon amitié
proche, transparente comme l'eau pure du plus beau des lacs de haute montage.
Je voyage, aller retour, en envoyant mes courriels, sans sortir de ma chambre.
Je t'envoie mes plus grands souhaits.
Ychaï.
Sept heures vingt
cinq.
Roger Bénichou-YchaÏ
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