Trois juin deux mil quinze. Huit heures
seize.
AnneAnne,
L’espace de mes réponses est un peu
plus long et je le déplore.
Merci de ton courriel et de tes
nouvelles.
De jour en jour, les effets de la
désintoxication se manifeste.
Hier, je suis encore descendu dans le
centre du pays parce qu’André Hajdu a donné un petit concert de ses œuvres
pianistiques.
J’ai passé toute la durée du voyage à
me donner des petits coups de doigts sur mon visage, ayant l’impression d’avoir
subi une anesthésie dentaire.
Mon état général physiquement et
mentalement s’est beaucoup amélioré, je ne regrette aucunement ma décision de
sevrage, j’accepte et je suis heureux de toutes les conséquences.
Je me sens comme une fleur qui déploie
ses pétales. Cette éclosion, comme toute éclosion (j’écris à la place de la
fleur), doit être comme un accouchement douloureux.
Avec ces derniers temps, mes voyages,
mon emploi du temps ou mes résolutions d’ordre, de travail se sont disloquées.
La fin de l’année scolaire disperse
aussi mes prévisions car les jeunes assistantes sont en pleine période d’examens.
Huit heures trente.
J’ai rendez-vous avec Esti H., une
amie avec qui nous avons peint à Mousrara pendant de longues années dans
l’atelier que dirigeait Anatoly Basin. Hedi Tarjan avait repris la direction de
cet atelier, quand Anatoly Basin, n’a plus voulu enseigner.
Faut-il accorder enseigner en « é »
ou en « er » ?
Je voulais perfectionner l’écriture de
l’histoire du « Sage David ».
Progressivement, dans mon travail de
recherche archéologique dans tous mes papiers et petits bouts de papier, je
retrouve des dates, des adresses, des noms.
La continuation de la chronologie
s’est un peu distendue. Il faut que je repense comment structurer toutes mes
pensées organisatrices.
Le studio, l’appartement, le nouveau
désir de mettre à jour et au monde mes travaux.
Peintures, écrits et autres.
Je n’ai pas encore réussi à
rencontrer Albert S. pour parler du projet d’écriture de la présentation
de « Mère ».
C’est un écrivain, qui a écrit une
critique publiée dans un journal local il y a plus de vingt cinq ans, homme
très sympathique mais un peu oriental dans sa notion du temps.
J’avais connu sa mère, venant du
Maroc, décédée, depuis quelques années, qui avait créé un kiosque, petit restaurant,
au coin de la rue Azza (Gaza). « A » en arabe se prononce
« ga ». « Rrâ » profond, un peu comme la « jota »
espagnole.
Albert a repris cette activité. Une de
mes assistantes, Ruth, a travaillé dans ce kiosque surmonté, d’un grand parapluie.
Ce kiosque a été restauré par l’écrivain, qui lui a donné comme nom
« Sigmund », en référence à Freud.
Je travaillais dans les années mil
neuf cent quatre vingt deux – quatre vingt trois comme vendeur d’appartement
dans l’agence que Ben et Anne avaient créée dans cette même rue.
Je me prépare à rencontrer Esti H. à
neuf heures trente, dans la petite épicerie « bio », à l’entrée de laquelle,
il y a un petit coin restauration. Le nom de ce magasin bio et organique est « Zmora ».
Ce nom sonne et fait résonner dans ma tête le nom d’une vielle tante que je
revois vieille et malade dans son lit, au-dessous duquel les petites pâtes
alimentaires qu’elle fabriquait entre deux doigts et auxquelles, elles
donnaient une forme de petite graine allongée, étaient mises à sécher.
Elle habitait chez l’unique sœur de
mon père, Marcelle.
Marcelle s’est mariée. Son mari
s’appelait Benichou, comme notre nom de famille.
Pendant longtemps, je n’ai pas compris
pourquoi, malgré son mariage, elle s’appelait encore comme moi.
AnneAnne,
Malgré que je n’écrive pas, je pense à
toi. Le dernier de tes courriels donne l’éclat de l’attente des prochains.
Je t’embrasse les bras grands ouverts
pour l’accueil le plus affectueux.
Ychaï.
Neuf heures.
Roger Bénichou-YchaÏ
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