Trente janvier deux
mil quinze. Seize heures trente.
Mon tourment
obsessionnel.
AnneAnne,
Écrire, non quand
je le veux mais quand ma tête se libère de mes obsessions actuelles.
Dans mes jours et
mes nuits agités.
Je n'arrive pas à
m'habituer à mes nouvelles lunettes bifocales.
Penser que tu vas
mieux, souhaiter ce mieux avec toutes mes forces.
Si je me souviens
bien, j'avais commencé le récit de ces dernières années.
Cela pourrait être
à partir de deux mil cinq.
Il faut que je
regarde les factures du studio pour écrire exactement la date de mon entrée
dans le studio.
Peu à peu, le
studio a été connu. Nous avions un public varié. Très souvent autour de cent
personnes, mais la caisse était pauvre.
Une petite
histoire.
Le soir d'un
concert où il y avait beaucoup de monde et de succès, la caisse était bien
remplie malgré la modique somme du prix de l'entrée. Le concert s’était
terminé. Je ne savais pas où mettre la recette assez élevée, j’étais angoissé
et pressé de trouver une cachette. Il y avait beaucoup de mouvement, encore dans
le studio, je décidai donc de cacher cette somme sous mon matelas et me couchai
dessus, très fatigué. Le matin en me levant, après avoir bu mon premier café,
j'ai voulu récupérer la somme pour faire ma comptabilité. Je soulevai le
matelas, sans trouver la somme. L'angoisse me reprit, je me mis à chercher avec
une folle fébrilité, remuant tous ce qui pouvait être remué. Rien toujours, je
n’en croyais pas mes yeux. J’appelai Yaniv S. en pensant que des forces
fraîches et un œil non encombré m’aiderait. Lui aussi ne trouva rien. J'ai
passé la journée à fouiller ma mémoire jusqu'à me rendre malade.
Cette somme n'a
jamais été retrouvée.
Amit se maria avec
une polonaise rencontrée à Charleroi, la ville de Rimbaud, lors d’un festival.
Il présentait sa
très belle pièce de marionnettes dans ce festival.
Cette polonaise le
dragua et ils se marièrent. Je n'ai pas eu de nouvelles depuis son mariage.
Yaniv S., faisant
une tournée de concert en Croatie, tomba amoureux de Mia, sa guide croate, et
Mia tomba aussi amoureuse de Yaniv.
Après avoir vécu en
Israël pour essayer leur couple, ils se marièrent dans le pays de Mia. Tom,
quatre ans, est leur enfant.
Mia est une très
bonne sculptrice. Elle gagne sa vie sur internet en dessinant des modèles de
robes. Yaniv S. fait une belle carrière en solo, il n'aime pas être embêté par
d'autres artistes. Il a construit un très beau spectacle avec des petits robots
qu'il construit lui-même. Ces robots jouent de la musique. Yaniv S., derrière
ses consoles d’ordinateur, dirige le spectacle, joue de tous ses instruments et
de sa voix tout en manipulant les lumières. Il vient souvent me voir quand il
est à Jérusalem.
Je suis allé les
visiter dans la maison en bois où ils vivaient en Croatie. Tom n'était pas
encore né. Mia avait adopté un petit chat très agile et affectueux. Cette
maison se trouvait sur une montagne à quelques centaines de kilomètre de
Zagreb. Une maison entièrement vieille et écologique avec un jardin en pente.
J'ai fait quelques
peintures que je leur ai laissées.
Le studio s'est
vidé de ces deux occupants.
Doron, qui vit avec
une danseuse moitié hollandaise, moitié indonésienne, habite à Amsterdam. Doron
a habité le studio pendant quelques temps quand il a rompu avec sa dernière
maîtresse. Je l'ai recueilli pour lui éviter le désespoir. Il a fait un
spectacle de danse « Buto » avec mon grand collage « A Demain, A
Deux Mains » en toile de fond.
Doron m’a fait
connaître Itaï, vidéaste. Il est venu en Israël pour filmer ma fresque « A
Demain, A Deux Mains ». Après quelques longs mois, si ce n’est un an, il
m’a envoyé des bribes de son travail. Notre relation s’est mal terminée. Il
avait promis de faire le montage de la vidéo qu'il a filmé pendant un mois et
pour laquelle, j'ai organisé une belle exposition qui a duré cinq heures. J’ai
du travailler presque seul, deux jours pour l'installer sur le mur. Elle mesure
quatre mètres de haut sur trois mètres vingt de large. L'échelle était très
haute, cinq mètres. J'ai du appeler deux danseurs pour grimper et m'aider.
Espérons que je
détaillerai cette très belle exposition. André H. et ses musiciens, Yoram
Zerbib, un ami très bon guitariste, ont fait un beau concert. Détails à venir.
Écrire calme mon
extrême agitation, mais je dois quitter l'ordinateur pour reposer mes yeux qui
ont beaucoup lutté avec mes lunettes. Quitter, mais à regret.
Dix sept heures
trente.
AnneAnne,
De ce loin
approximatif, la distance s’efface et le temps aussi par l'amitié …
Amitié vraie,
sincère, affectueuse, attentive, transparente et intense. Rouge de pudeur.
Ychaï.
Dix sept heures
quarante.
Que de choses à
raconter !
Roger Bénichou-YchaÏ
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