lundi 5 septembre 2016

20 decembre 2014 Roger

Jérusalem le dix huit décembre deux mil quatorze à quatre heures trente.

André H. Histoire de sa vie. 

AnneAnne, 
Après avoir parlé à Steve H., pour lui demander s'il possédait un enregistreur de voix.
J'ai été le voir hier matin vers dix heures. 
Il m'a fait la surprise de m’offrir un petit appareil enregistreur. Ce don m'a beaucoup touché.
L’après-midi, je suis allé visité André H., dans l'intention de lui faire préciser les dates en les écrivant et en enregistrant en cachette avec le nouvel appareil. J'ai trouvé André H. plus fatigué que le dernier lundi, sa parole un peu plus basse, sa mémoire confondant les dates. Sa main droite tremblait, son visage était plus émacié, il avait maigri : de visage et de corps. Il m'a semblé plus vieilli que lors de ma dernière visite.

Je fais une pause avec ce courriel pour mettre au propre mes notes. J'écrirai ensuite  les dates sur ce courriel. Elles m'ont servi à m'aider à boucher les trous de mon travail de restauration personnelle.

André Hajdu.
Le quatre décembre mil neuf cent cinquante six, il s'enfuit de Hongrie, alors en pleine révolution. Les russes étaient entrés avec leurs tanks à Budapest.
Miki E. a conseillé à André H. de partir.
Il trouva un passeur qui les conduisit contre payement dans un char à bœufs, avec d'autres personnes voulant s’enfuir. Le passeur connaissait un endroit où la frontière n’était pas surveillée. Après avoir traversé un bois, il les déposa et leur indiqua le passage, en les faisant descendre du chariot.
André H. et ses compagnons coururent et traversèrent la frontière. Ils arrivèrent du côté autrichien où un autre passeur les conduisit à Vienne. Les réfugiés furent alors recueillis par des organismes. André pensa rejoindre Grunki, qui avait déjà rejoint l’Angleterre. Il alla à l'ambassade d'Angleterre, mais, voyant une grande file d'attente devant le bâtiment, André H. n’eut pas la patience de faire la queue, il préféra se rendre à l'Ambassade de France où la file d'attente était moins longue.
Il partit pour la France. Il fut dirigé vers Rouen et Caen qui regroupaient les réfugiés. Le comité d’accueil leur fit remplir leur formulaire de demande d'asile politique. Il lui fut aussi demandé de marquer ses empreintes digitales.
Il se retrouva à Paris. Il ne m'a pas dit par quel moyen de locomotion ni comment. Il savait qu’il pouvait être hébergé dans l’appartement de son oncle Michi K., frère de sa mère. Le concierge, n'ayant pas la clé de l’appartement, ne lui permit pas de dormir chez son oncle. Son oncle, Michi K., habitait depuis plusieurs années à Paris. Son oncle était alors en voyage d'affaires et André H. ne le savait pas.
André H. chercha et trouva un hôtel à Pigalle, loua une chambre et dormit vingt quatre heures d’affilée. Il se réveilla sans savoir ni l'heure qu’il était ni la date.

Michi revint. André H. pût alors s’installer chez lui.
Il me raconta qu’il apprit le français avec les disques de Brassens et de Jacques Brel.
En mil neuf cent cinquante huit, il reçoit une bourse d'études d’été et part vers l'Italie, à Sienne. Il y reste un mois.
Fin mil neuf cent cinquante neuf, il commence à penser à partir en Tunisie comme professeur au conservatoire de cette ville.

Csernus, ayant une grande culture cinématographique, l’entraîna dans tous les cinémas de Paris.

Je fais une pause. Il est sept heures quarante.

Jérusalem le vingt décembre deux mil quatorze.
Je reprends cette écriture, que je n'ai pu finir la dernière fois.
Mil neuf cent cinquante sept : Zsuszi, la femme de Miki E., Cernus et sa femme sont à Paris. 
Je rencontre André H. dans la maison des étudiants juifs au neuf rue Guy Patin, à Paris, dans le dixième arrondissement.
Mon frère Henri habitait cette maison d'étudiants. Je le visitais de temps en temps.
André H. est alors un grand ami d’Abraham et de sa femme Maria Torok, dont j’ai lu les livres dans les années mil neuf cent soixante quinze.  
Fin mil neuf cent cinquante neuf. 
André H. hésite entre accepter d’entrer en tant que chercheur au CNRS et à partir enseigner en Tunisie, comme professeur de musique.
André H. m'avait conseillé de retourner pour finir mes études à Oran. Je le retrouvai à Paris, venant d'Algérie. Il figurait, grâce à Jean Shmit, dans un film du metteur en scène Orson Wells. J’ai une photo de ce passage dans le film. Je ma mettrai dans la chronologie.

Mil neuf cent soixante. Au cours d’un deuxième séjour à Anglet, André H. se casse le péroné en jouant au volley-ball. Il est soigné à l'hôpital de Bayonne, puis rentre à Domont, à côté de Paris, où habitait sa mère.
Il lit « la Recherche du Temps Perdu » de M. Proust pendant sa convalescence qui a duré trois mois. Je lui ai rendu visite souvent.
En mil neuf cent soixante et un, André H. rencontre Sam G. à « Guy Patin », surnom pour désigner la maison d’étudiants. Il se lie d’amitié avec le père de Sam G. à Pâque. Le père de Sam G. est très versé dans les écritures saintes et les commentaires.
André H. fut très impressionné par la culture juive du père de Sam G. 
Celui-ci habitait une vieille maison avec une grange où, Miki organisa de grandes soirées quand il fut hébergé chez les G.
Le père de Sam G. gagnait sa vie en récupérant et en revendant des cartons vides qu’il ramassait avec son camion.
André H. est aussi ethnomusicologue, avait écrit en Hongrie une pièce pour grand orchestre : « Cantate Tzigane », qui reçut un prix en Hongrie.
Les événements de Suez provoquent l’exil des juifs et des français de Tunisie.
Miki E. est à Paris où je l’héberge dans l'appartement de mes parents, au numéro cinquante deux, avenue de Fontainebleau, au Kremlin – Bicêtre. Mes parents étaient toujours en Algérie. Ils seront rapatriés après la fin de la guerre en mil neuf cent soixante deux.
A la déclaration de l’indépendance d’Algérie, ma mère, ayant été agressée, doit être soignée pour une fracture du crâne.

Mil neuf cent soixante deux.
André H. habite une chambre à Neuilly, avec un grand piano à queue. La chambre se trouve dans un appartement où réside la propriétaire, une vieille femme seule.
André H. habite à Neuilly jusqu'en mil neuf cent soixante six.
En mil neuf cent soixante trois, il y reçoit Miki E. pour quelques jours.
En été, mil neuf cent soixante cinq, il fait la musique d'un film réalisé avec Burt K., tourné à Londres.

Dix neuf décembre deux mil quatorze à dix heures cinquante.
Je sors le linge de la machine, je l'étends sur une échelle en bois, placée dans ma chambre à coucher où je ne dors pas actuellement. Ayant besoin de changement, je me suis installé dans le salon cuisine, du côté « espace ordinateur ».
Il fait froid et pluvieux. C'est la raison pour laquelle je fais sécher le linge à l’intérieur et non sur le balcon.

Mil neuf cent soixante trois.
André a monté une chorale au château de Laversine, dans une banlieue éloignée de Paris.
La connexion  avec Chata, directrice de cette fondation Laversine, fut faite par Tante Ida. Chata, autre rescapée de la Shoah, dirigeait cette école et l’internat.
J’allais souvent avec André H. écouter et voir les répétitions. De temps en temps il m’avait demandé d’accompagner la chorale à la guitare.
Rencontre de André H. avec Adi Etsion, chanteuse d’opéra, venue d'Israël (je ne suis pas sûr de la date).

Mil neuf cent soixante quatre. André fait la musique du deuxième film de B. Krancer. Il part rejoindre l'équipe à Hydra, île grecque où se tournait le film. Le film est tourné à Athènes et sera monté à Rome.
Je rejoins à Rome André H. en auto-stop.
Dadou et Iona, sa première femme, font le voyage en Israël. Ils en reviennent très déçus.
André H. n'a pas pu les rejoindre, étant en Italie.

Mil neuf cent soixante cinq. Par l’intermédiaire de Sam Gotferstein, André H. va louer un appartement, dans mon souvenir très sombre, rue Poissonnière. Akos, avait fui la Hongrie avec sa famille. Nous faisons, c'est à dire, Akos et moi, les travaux pour rénover l’appartement d’André H. Nous installons une salle de bain, peignons les murs en les ayant préalablement enduits, etc…

André H. a composé un livre de petites pièces pour la guitare. J'ai organisé ces pièces, qui ne sont pas seulement pédagogiques, mais vraiment musicales. J’ai écrit les doigtés et F. H. y a écrit des textes et des poésies, avec lesquelles je n’étais pas toujours d’accord.
Dans ce même temps, le temps de la rue Poissonnière, je loue une chambre de bonne avec Lenke dans le même immeuble.
Nous y avons vécu de mil neuf cent soixante cinq jusqu'en mil neuf cent soixante six. Date de notre séparation.
Après cette rupture, je déménageai dans le même immeuble, première entrée à l'étage dans un petit studio.
J’avais fait la connaissance d’un musicien indien que j'ai hébergé. Il jouait de Zurbahar, sitar basse. Il avait fui l'Inde à cause le la misère, et comme beaucoup de réfugiés, voulait revernir sa vie à l’aide de la musique orientale, pratiquement inconnue en France à cette époque. Les dernières nouvelles que j’ai eues de lui sont son installation en Belgique et sa réussite comme gourou – musicien. Il a les doigts pleins de diamants.

Mil neuf cent soixante sept. La Guerre des Six Jours.
André H. est reformé. Sa mère veut absolument, s’engager dans l’armée, mais elle n’y est pas acceptée.
Je voyage en Israël par le bateau. Ce fut un voyage très agréable. Je serai hébergé chez ma sœur Denise, habitant déjà à Jérusalem, à Ramat Eshkol.

Mil neuf cent soixante dix. Hedi T. visite André H. Avec sa femme Ruth, ils ont eu leur premier fils Yaïr.
Hedi T. est revenue dans le pays quand elle eut réussi à sortir sa mère de Hongrie. Elles s'y installeront. André H. et Hedi T. habiteront Jérusalem.

Mil neuf cent soixante dix neuf. Miki E. est à Paris. Il va par la suite visiter André H. en Israël.
De mil neuf cent cinquante six jusqu'en mil neuf cent quatre vingt cinq, André H. n’est pas retourné dans son pays natal, la Hongrie.
Avant mil neuf cent soixante sept. J'avais voyagé plusieurs fois en Hongrie. J'ai reçu une bourse en mil neuf cent soixante sept pour étudier à Budapest un an.

Onze heures vingt cinq. Je fais une pause pour me lire et boire mon quatrième café.
Onze heures quarante cinq. J'ai fini une première correction. Je reprendrai l'écriture plus tard.

Roger Bénichou-YchaÏ


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