Dix janvier deux mil quinze à neuf
heures quarante cinq.
Radio.
AnneAnne,
J'ai passé ces deux derniers jours,
l’oreille tendue vers la radio, arpentant mon salon, m’asseyant, me levant,
fasciné par cette forme d'oralité répétitive, me culpabilisant de subir cette
attente de dénouement. Il s’agit des attentats de « Charlie Hebdo »
et « Hyper Cacher ».
Je ne suis sorti vendredi matin, que
pour aller à un rendez-vous avec D. Ep. Je suis allé chercher la voiture chez
Netanel E., pour visiter André H.
André H. a une voix encore faible,
porte des gants aux mains. Il n'a pas dormi. Il est souvent assis dans la
cuisine pour être à côté du poêle.
Je me suis assis en face de lui. Je lui
ai posé quelques questions sur sa santé, questions auxquelles il a répondu
faiblement. Depuis ces derniers jours, il demande à ses visiteurs de parler. Il
est présent, mais sa fatigue ne lui permet pas de se concentrer et il ferme
souvent les yeux. Je lui ai raconté les évènements de Paris.
Toujours très faible, il ne mange que
très peu.
Son fils aîné est arrivé. Je suis
parti pour les laisser seuls.
Retour boulevard Hébron où je me suis
remis à mon écoute obsessive.
La nuit est tombée avec la neige
remplissant le paysage, plus beau avec cette blancheur.
Je continue à écouter la radio, mais
aujourd'hui, je me suis branché sur un philosophe que j'aime beaucoup, tout en
arpentant encore mon salon, cuisine, devenu maintenant ma chambre à coucher.
Neuf heures cinquante.
Une pause pour me concentrer, ne pas
faire deux choses en même temps.
J'écoute.
Onze janvier deux mil quinze. Six
heures.
Je me suis levé tôt et réveillé
encore plus tôt. Je continue à écouter la radio, ce que je fais rarement et
jamais d'une manière aussi obsessionnelle.
Je suis allé visiter André H. hier
vers quinze heures, je l'ai trouvé avec la bouteille d’oxygène, toujours aussi
fatigué et ayant froid jusqu'à porter des gants à un mètre du poêle.
Yaïr, son fils aîné, était aussi là.
Il lui massait la gorge. André H. tousse beaucoup.
Il ne pouvait pas parler, mais sa
voix était plus forte. J'avais perdu aussi ma voix depuis ma visite et le repas
pris avec la famille de mon neveu Avidan E.
Je n'arrive pas à me concentrer pour
reprendre mes histoires, étant surtout préoccupé de voir André H. dans cet
état.
J'espère que le problème de ta vue
s’améliore.
Ne réponds pas, pour donner plus de
repos à tes regards. Le silence est une aussi une preuve d'amitié et
d'affection.
Mes pensées sont fixées sur l'état
d'André H. Elles ne peuvent s'en détacher, tournent dans tous les sens.
Je n'ai pas réussi à m'endormir hier
soir, malgré le nouveau cachet. J'avais voulu le silence et avais fermé les
radios.
Deux heures après, j'ai du me lever
et allumer ma tablette pour écouter de la musique. Cela calme le déroulement de
ma pensée.
Six heures vingt.
Mes yeux sont aussi fatigués par
cette écoute et la recherche d'informations sur l'ordinateur.
A tout à l'heure.
Ychaï.
Je voudrais t'écrire sur autre chose
que mon actualité.
Roger Bénichou-YchaÏ
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