Seize janvier deux mil quinze. Huit heures quatorze.
Suite du trajet vers Shiraz.
AnneAnne,
Bonjour, avec beaucoup de bons.
J'ai lu ton dernier courriel avec les conseils pour les
raccourcis.
J'ai donc installé une petite fenêtre sur le bureau écran, mais
n'ayant pas bien compris la suite des opérations, je me suis laissé aller à
d'autres manipulations qui m'ont permis de constater combien de graves fautes
ont entraîné l'effacement de fichiers importants. Ce petit paragraphe,
ci-dessus, non pas pour me plaindre, mais pour information.
J'admire ton courage de m'écrire malgré tes yeux fatigués, en te
remerciant encore plus fortement et fermement que d'habitude. Mais est-ce une
habitude ?
Sans attendre de réponses, je demande de tes nouvelles pour être
proche de ta réalité et non point de mon imagination.
Arrivée à Shiraz.
Pressé de rencontrer Djamchid C., nous n'avons pas passé de
temps à visiter le centre ville. Nous nous sommes dirigés vers le campus
universitaire où je savais que les participants à ce festival résidaient.
Nous avons pu trouver rapidement Djamchid C. qui, avec
étonnement et joie, nous accueillit. Lui-même ne croyait pas que Serge et moi
avions effectué ce voyage en vieille moto « Java » de deuxième ou
« x » mains.
J'avais eu la sagesse, à Téhéran, de prendre rendez-vous et
d'avoir été reçu par le Ministre de la Culture, qui, après mon récit de mon
voyage et de mes aptitudes de musicologue, nous a accordé la gratuité d’accès à
toutes les manifestations, concerts, hébergements et restaurants dans ce campus
universitaire servant de lieu d’hébergements pour les musiciens et organisateurs
de ce festival. Quand je saurai mieux me servir de la fonction
« attaché », j'enverrai des photos prises par une photographe française
que j'avais rencontrée en circulant sur ma « Java » dans les allées
de ce campus. Elle faisait du stop. Je l'ai embarquée sur mon véhicule.
Mali, cette photographe, est devenu une amie proche et attentive
qui est venue me visiter ici et avec laquelle je corresponds. Elle a organisé
une exposition collective dans la cité d'artiste où elle résidait à Ivry et m'a
beaucoup aidé en mil neuf cent quatre vingt et en quatre vingt un lorsque que je me préparais à partir de la
France.
Je ferai un récit de nos aventures.
Avec l'aide de Djamchid C., nous nous sommes installés, Serge et
moi, chacun dans sa chambre, pour nous laver et nous restaurer. Djamchid C.
nous invita à découvrir cette ville de fleurs et de senteurs. Le soir, nous
avons pu assister au concert donné dans le site historique de Persépolis. Le
séjour fut un enchantement, musique et poésies de presque tous les pays, le
thème de ce festival étant la percussion.
J’eus la surprise de rencontrer une jeune femme persane, mariée
à un proche de la famille du Chah. J’eus une relation romantique très belle
mais courte.
Nous avons vécu un roman incroyable. Cette jeune femme (j'ai une
photo d’elle) souffrait de ses relations matrimoniales. Surveillée par la
police secrète, elle fut obligée de rentrer à Téhéran. Elle s'était confiée à
moi en anglais.
Jusqu'à maintenant, je me souviens de la douceur de la passion
qui nous a portés l'un vers l'autre. Ce fut une relation où l’équilibre, la
transparence de nos sentiments furent ressenti dans la confiance et la vérité.
Nous savions que nous vivions le moment présent et qu'il n'y
aurait pas de lendemain. J'ai commis une erreur.
Plusieurs fois, en ne laissant pas l'avenir se faire, sans
intervention de ma part, j’ai répété cette erreur.
En écrivant cela, j'eus en mil neuf cent soixante – soixante et
un, ce moment d’intense coup de foudre avec une hôtesse anglaise, venue
demander une chambre pour son séjour à Paris. Son séjour dura plus que les quinze
jours qu'elle avait prévus.
Nous avons vécu un an ensemble dans la chambre qui avait été mis
à ma disposition par le patron de l'hôtel « Studia », situé Boulevard
Saint Germain, en rétribution de mon travail de
réceptionniste nocturne.
Nous avons partagé le lit avec ma guitare, la chambre étant si
petite que je n'avais pas d'autre endroit pour ranger mon instrument.
Je fus très triste de son départ, je n'avais pas été capable de
faire vivre notre relation à cause de la médiocrité de mon salaire.
Elle n'avait pas pu trouver du travail, ni perfectionner son
français.
J'écrirai plus tard cette période enchantée.
Neuf heures treize.
Je me prépare à sortir pour mon rendez-vous avec G., rendez-vous
hebdomadaire, échange qui me soutient.
Avec mes souhaits, mes enthousiasmes (aux pluriels), malgré que
le ciel soit gris, je prends à l'intérieur de moi-même, intérieur où réside la
chaleur de notre amitié, le soleil de notre affection.
Souhaits pour une amélioration de tous tes maux.
Ton écriture, tes mots (ce n'est pas une blague Lacaniènne sur
la prononciation de « A O ») touchent mon cœur, n'ayant pas en ce moment de l'esprit. J'ai surtout une émotion au bord des larmes,
une boule dans le ventre.
Affections rouges comme mon nom. « Roger » pour « rouge »,
« Haïm » (vies). H que l’on doit prononcer « r » comme la « jota »
et non « h » comme dans « hache » aspiré.
Et pour toi, Ychaï.
Neuf heures trente.
Pas le temps, avec excuses, de corriger.
Roger Bénichou-YchaÏ
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